L’objectif d’un million de nouveaux apprentis par an est-il atteignable ?

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Le principal objectif fixé par Emmanuel Macron pour développer l’apprentissage est bien connu : créer un million de nouveaux contrats d’apprentissage par an d’ici à 2027. Si la forte augmentation du nombre d’apprentis ces dernières années semble aller dans ce sens, un tel objectif reste difficile à atteindre. En s’appuyant sur les derniers chiffres publiés par la Dares et en prenant en compte les évolutions historiques du marché de l’emploi en alternance, le site « Management de la formation » s’est penché la faisabilité de cette ambition gouvernementale.

Un âge d’or de l’alternance ?

Le constat est clair : il n’y a jamais eu autant d’apprentis en France, ni autant de salariés en alternance. C’est principalement le fruit de la politique gouvernementale d’aides publiques à l’embauche conduite depuis l’été 2020.

La courbe du nombre d’entrées en apprentissage est éloquente. Celles-ci doublent entre 1993 et 2007, se stabilisent ensuite autour des 300.000 par an jusqu’à 2018, avant de connaître une explosion entre 2020 et 2022. Elles atteignent 837.000 en 2022.

Le nombre d’apprentis en contrat suit la même évolution, avec un léger tassement dans les années 2010 autour de 400.000, puis une envolée qui amène la courbe à flirter avec le million en 2022, avec 980.000 apprentis.

Si l’on ajoute les contrats de professionnalisation, le million est largement dépassé : au 31 décembre 2022, près d’1,15 million de salariés travaillaient en contrat d’alternance au sein des entreprises et des administrations françaises. Soit environ 5% des salariés.

Les dernières évolutions du marché de l’emploi en apprentissage

Les données de la dernière étude de la Dares permettent par ailleurs de détailler les profils des bénéficiaires de contrats d’apprentissage. Il en ressort principalement le constat d’une modification rapide du profil des apprentis : l’âge moyen des apprentis, qui augmentait déjà depuis 30 ans, s’est élevé beaucoup plus rapidement depuis 3 ans. La part des 22 ans et plus est ainsi passée de 5% à 19% entre 1993 et 2018, puis à 32% en 2022. Ce constat s’applique également au niveau de formation à l’entrée en contrat : en 2022, les bac+2 représentent presque 40% des nouveaux apprentis.

Les aides à l’apprentissage ont donc bénéficié prioritairement aux plus diplômés et aux plus âgés et ce d’autant que la réforme de 2018 a étendu l’âge maximum pour entrer en apprentissage à 30 ans.

Des évolutions pérennes ou éphémères ?

Pour les auteurs de l’analyse, l’augmentation rapide de l’apprentissage au cours des 3 dernières années dissimule un double mouvement : une augmentation significative de l’embauche des profils correspondant aux objectifs « historiques » du dispositif (plus jeunes, moins qualifiés, dans les TPE de l’industrie, de l’artisanat et du commerce, pour des durées longues), combinée à une irruption massive de nouveaux profils (plus âgés, plus diplômés, dans les services et les grandes entreprises, pour des durées courtes).

Dans quelle mesure ces évolutions sont-elles le fruit artificiel des aides exceptionnelles consenties aux entreprises depuis l’été 2020 ? Les chiffres de 2023 apporteront une première réponse, à travers la réaction des entreprises au changement du montant des aides. Mais c’est surtout l’incertitude concernant la pérennisation de ces aides qui fait peser un doute sur l’avenir de cette voie de formation.